Tout le monde en remettait en février à propos de l'échec de François Legault à faire plier Ottawa devant les demandes du Québec en santé, immigration, reconnaissance de notre statut national, défense du français, etc. Il y a une sorte d'unanimité concernant l'échec de la stratégie de Legault et l'échec du rapport de force électoral obtenu lors de la dernière élection. Ses déclarations sur la péréquation comme incontournable sont venues boucler la boucle.
Que reste-t-il à Legault comme solution de rechange?
De toute
évidence, un recours direct au peuple. Mais comment? Par des référendums
spécifiques, sur l'immigration, le français. Le problème avec la
stratégie référendaire – le PQ en sait quelque chose – c'est qu'elle
divise la population en deux camps qui se braquent, et dans le contexte
actuel, un consensus clair est difficile sinon impossible à atteindre. On
a aussi parlé de grande consultation publique, du type de celle de
Bélanger-Campeau, mais une telle consultation n'est pas un exercice
direct de la souveraineté populaire, et n'a donc pas de force
«constitutionnelle». Trudeau aurait beau jour d'en balayer les résultats
du revers de la main.
Le seul recours valable à l'exercice de la
souveraineté du peuple québécois demeure, selon moi, la convocation
d'une assemblée constituante représentative avec mandat de consulter la
population et de proposer le texte d'une première constitution du
Québec. Le consensus auquel parviendrait une telle Constituante se
situerait sans doute quelque part entre le statu quo et l'indépendance,
étant vu comme ce qui est concrètement possible et souhaitable. Face à
un référendum approuvant le texte d'une telle constitution, Ottawa
serait juridiquement et constitutionnellement obligé de plier, comme l'a
clairement établi le jugement de la Cour suprême dans le Renvoi relatif
à la sécession du Québec (1998).
Legault ira-t-il jusque-là?
Pour
le moment, rien n'a transparu dans ce sens chez lui. Et aucun des
autres partis ne semble vouloir étudier sérieusement cette possibilité. Le
temps serait-il venu d'en faire l'objet d'une vaste pétition nationale?
Peut-être, mais aurions-nous le courage de nous mobiliser pour une
telle pétition? Je vous le demande. Ou est-ce que chacun préfère mener
ses petits combats personnels.
Quand on dit que le Québec est une fois de plus à la croisée des chemins...
Selon André larocque
2023, l’année des grands défis
L’année actuelle en est une qui nous place devant des enjeux historiques et
incontournables qu’il faut aborder en sortant des sentiers battus.
DÉFI 1 : mettre à jour de nos réseaux de services collectifs
Les
Québécois sont fiers d’avoir pu, grâce à leur prise en mains de
l’énergie et des retraites, se doter d’une solidarité sociale unique en
Amérique : c’est un des
héritages les plus précieux de la Révolution tranquille. Mais avec le
temps et le vieillissement de la population, ce réseau de solidarité
sociale, basé sur l’égalité de tous, exige une mise à jour complète de
son déploiement sur le territoire :
a) réseau
de la santé — incluant les aînés et la santé mentale
b) réseau de
l’éducation — incluant garderies, écoles, DPJ, culture et francisation
c) réseau des transports territoriaux
d) réseau des gouvernements
territoriaux
DÉFI 2 : institutionnaliser nos relations avec les premières nations
Nos
relations envers les premières nations sont encore enfermées dans des
institutions fédérales (Loi des Indiens, Pensionnats, Réserves, double
administration)
qui ont été créées dans le but de faire disparaître ou au moins
d’assimiler les peuples autochtones, de façon à ce qu’ils ne puissent
entraver l’exploitation des ressources du territoire. Il est urgent de
créer une structure permanente dont la mission soit
de gérer les relations entre la nation québécoise et les nations
autochtones, soit définir, de nation à nation, la façon de cohabiter et
de partager les usages du territoire commun que nous habitons. Il faut
sortir le plus rapidement possible du système de
dépendance actuel et de la gestion au cas par cas. La jeunesse
autochtone en fait une priorité.
DÉFI 3 : stopper le déclin du français et de l’identité québécoise par la création d’une CITOYENNETÉ QUÉBÉCOISE
La
pression mondiale de l’immigration multiculturelle et de l’anglais
comme langue commune dans le monde actuel est devenue si forte qu’il
est devenu clair qu’il
faut fournir un meilleur encadrement à la langue et à la culture
française d’une part, et d’autre part, des moyens qui permettent de
maintenir une identité québécoise commune forte et dynamique.
En
plus des lois visant à protéger et développer l’usage de la langue
commune et la culture qui en découle, et de moyens sans précédent pour
la francisation des
écoles, des milieux de travail, de l’immigration et de nos institutions
culturelles propres, la création d’une CITOYENNETÉ QUÉBÉCOISE,
englobant tous les aspects de l’identité québécoise nous paraît
nécessaire pour servir de guide à cette réappropriation
de notre territoire (pays) et de notre identité (langue commune,
laïcité, égalité, solidarité sociale, histoire des Français en
Amérique). Un ministère de la citoyenneté québécoise pourrait devenir le
moteur de ce réveil national.
DÉFI
4 : gérer démocratiquement une véritable transition écologique axée
sur les vrais responsables de l’impasse écologique : les grands
dirigeants capitalistes
et leurs serviteurs politiques
La
dégradation des écosystèmes n’est plus à démontrer : virus, changements
climatiques, vie naturelle, paix sociale, santé mentale, errance
intellectuelle, dégradation
de la démocratie. Les grands dirigeants du capitalisme ont porté nos
systèmes naturels et sociaux à un point de rupture et il n’est pas sûr
que nous pourrons stopper la machine à temps. Il faut faire les
redressements nécessaires, s’en prendre aux véritables
coupables, les dirigeants capitalistes, et mettre tout ce qui nous
reste de démocratie pour rétablir la priorité de la Nature dans nos
vies. Notre utilisation de l’énergie, des forêts, des mines, de
l’agriculture, des pêcheries et de la biodiversité en général
doit être complètement repensée. Il faut s’attaquer aux vraies causes
et aux vrais responsables des problèmes et faire les changements
nécessaires dans nos institutions démocratiques pour redonner au peuple
le contrôle des décisions. C’est le plus grand
défi démocratique de l’histoire de la planète et notre seule voie de
sortie.
DÉFI 5 : la constitution comme clé de la solution
Le
monde est à refaire : la politique, l’économie, la culture. Nous avons
perdu notre âme et perdu contact avec le mystère de la Nature. Il faut
reconstituer le
monde, nos sociétés et nos vies sur le fondement de la Nature et du
Peuple. C’est l’enjeu de la sixième extinction.
Ce
qui CONSTITUE un pays, un État, une société et garantit sa pérennité,
c’est une Constitution écrite et approuvée par ses membres. Le
fondement de l’exercice
démocratique, c’est la souveraineté du Peuple.
Pour
refonder le Québec et le monde de demain, notre rapport au monde et à
la Nature, et ainsi garantir son avenir, il faut convoquer une assemblée
constituante
représentative, et cet exercice devrait pouvoir se prolonger sur le
terrain par l’écriture de constitutions régionales, locales et
communautaires. Il faut refaire le monde sur la base de communautés
locales autonomes et durables.
C’est
cet exercice démocratique qui peut seul nous permettre de sauver la
paix dans le monde, à l’heure de l’Ukraine. Au-delà du Kremlin et de la
Maison blanche,
il y a le PEUPLE. Ce qui est en cause en Ukraine, tout comme en Russie
et aux États-Unis d’ailleurs, c’est justement la souveraineté du
peuple sur son territoire.
Seule des constitutions démocratiques issues du Peuple et fondées sur le pouvoir du Peuple peuvent ramener
la paix.
MÉMOIRE
À LA COMMISSION DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE SUR LE PROJET DE LOI 39 : RÉFORME
DU MODE DE SCRUTIN
Un
texte d’André Larocquecomposé
en janvier 2020 et tout à fait pertinent encore à ce jour
« La
volonté du peuple est le fondement de
l’autorité des pouvoirs publics »
— Déclaration
universelle des droits de l’homme
Et si
la démocratie était la propriété des citoyens ?
Le vice congénital
des institutions britanniques, notamment le parlementarisme et le mode de
scrutin, est que le pouvoir n’est pas entre les mains du peuple mais entre
celles des partis politiques. Le Québec vit une forme minimaliste de démocratie. Il vit en fait en « partitocratie ».
Comme l’a dit un politologue britannique : « Bristish Government is
Party Politics »
L’usurpation
du pouvoir populaire par les partis est évidente partout. Depuis 1944, les deux tiers des gouvernements
au Québec ont été élus sans avoir obtenu l’appui populaire majoritaire. Même
que trois ont été élus malgré qu’ils aient terminé second au vote populaire
(1944, 1966, 1998). Le gouvernement de Jacques Parizeau a obtenu une solide
majorité des sièges en 1994 (ce qui l’a justifié d’aller en référendum !) alors
qu’il avait obtenu une majorité populaire d’à peine 14,000 votes (0.3%)
Le
[premier] gouvernement [de la CAQ] a été élu avec 38% des votes. Plus des deux
tiers (67.2%) des députés de l’Assemblée nationale y siègent sans avoir obtenu
un appui majoritaire. Des quinze membres de la présente Commission des institutions,
neuf ont été élus malgré un vote minoritaire dont 5 députés de la CAQ, 2
Libéraux, l’unique représentant pour QS et celui pour le PQ.
Comment une
Assemblée et une commission parlementaire élues légalement mais sans légitimité
populaire peuvent-elles ne pas se rendre compte qu’en modifiant le système
électoral, les députés sont manifestement juges et parties et donc en évident
conflit d’intérêt ?
Et c’est là
loin d’être un cas unique. Le cas le plus grave a certainement été le sabotage
par les partis de la loi sur le financement des partis politiques. René
Lévesque aimait dire que si son gouvernement n’avait fait que passer cette loi,
toute sa carrière politique aurait été justifiée ! Il a écrit :
« De
toutes les réformes que nous avons pu mener à bien, voilà celle dont je serai
toujours le plus fier. Celle également qu’on ne laisserait ternir que pour
avoir un jour à s’en mordre les doigts »— René Lévesque : Attendez
que je me rappelle, page 385
René Lévesque était parfaitement
conscient qu’aussi longtemps que les partis politiques ne seraient pas assujettis
à la souveraineté populaire, la démocratie chez nous resterait minimale. Or les
députés de cette Assemblée, et cela sous un gouvernement du PQ, a carrément
renversé le principe fondamental au cœur de cette loi. Comme l’a dit le
« père » de la loi, Robert Burns :
« Aujourd’hui, l’orientation de départ est faussée
et même renversée. On substitue le financement de l’État au financement
populaire. (…) Un parti incapable de
subsister par un appui financier populaire ne mérite pas de continuer à
exister. » — Le Devoir, le 16 novembre 2012
Juges et
parties, les partis politiques se servent à même les deniers publics. Ce
faisant, il est remarquable de constater qu’ils démontrent une vive
compréhension de la notion de « proportionnalité »…! Ainsi, les
deniers publics sont répartis entre eux avec une grande précision jusqu’à deux
chiffres après la virgule! Pourtant, les mêmes partis sont d’une
incompréhension totale quand il s’agit de « proportionnalité » dans
l’expression de la volonté populaire! Le projet de loi 39 sur la compensatoire
en est un bel exemple.
Et
qu’en est-il justement de la compensatoire ?
L’entente
entre trois ou quatre partis d’Opposition à la dernière campagne électorale est
justement cela : un pacte entre partis, un pacte aujourd’hui mué en
entente sacrée où on nous dit que 70% des Québécois favorisent la
« compensatoire » puisqu’ils ont voté pour l’un de ces trois partis.
Comme si l’élection générale avait porté sur le mode de scrutin! Comme si on ne
pouvait faire la déduction inverse : cent seize (116) candidats du PQ ont
été battus, 115 candidats de QS aussi, en plus de 50 candidats de la CAQ… pour
un total de 281 candidats battus pour avoir prôné la
« compensatoire » !!
Comme
professeur, comme militant, comme sous-ministre, toute ma vie adulte a été
consacrée à combattre l’usurpation du pouvoir citoyen par les partis politiques
et à militer en faveur de la réforme de nos institutions, y compris la réforme
du mode de scrutin. Aujourd’hui, à moins
de changements majeurs, je me vois dans la situation paradoxale de devoir
voter « non » au référendum de 2022.
Pourquoi ?
Parce que la démocratie, pour reprendre Lincoln, est le
gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple, alors que la
compensatoire est une concoction de partis politiques, par les partis politiques,
pour les partis politiques.
Parce que, pour reprendre le verdict tant cité de René
Lévesque à l’effet que « le présent mode de scrutin est infect », la
compensatoire conserve les deux tiers de ce système infect (64%) Un système
infect n’appelle pas qu’on y compense. Il
appelle qu’on le « scrappe ».
Parce qu’en démocratie, le mode de scrutin est fait
pour les citoyens et non pas pour les partis.
Comme l’exprime clairement un Rapport de la commission britannique sur
la réforme du mode de scrutin en 1998 :
« Que
les électeurs obtiennent la représentation qu’ils veulent est plus important que le fait que les partis
politiques obtiennent le nombre de sièges qu’ils estiment leur être dû. Les
partis politiques doivent être les serviteurs et non pas les maîtres. Les
partis ne doivent pas se muer en entités mystiques possédant leurs droits à
eux. Cette tendance peut est dite l’approche « tabernacle » par
laquelle toutes les vertus appartiennent à ceux qui habitent le temple sacré
tandis que les autres à l’extérieur sont éternellement condamnés. Une telle
approche conduit presque infailliblement à ce que les partis se prennent pour
d’autres, deviennent dogmatiques quand ils sont au pouvoir puis sectaires quand
ils se retrouvent dans l’opposition. C’est aussi une recette pour le style
confrontationnel de politique qui a tant contribué à réduire le respect du
public pour la Chambre des Communes et pour la politique en général. » (The Report of the Independent Commission on the
Voting System in the United Kingdom, October 1998, section 6.)
Parce qu’avec le scrutin dit majoritaire, y compris
avec compensation, le nombre de sièges prend scandaleusement plus d’importance
que le nombre de votes : les partis sont plus importants que les citoyens!
Le récent exemple au Royaume Uni l’exprime bien. Alors que le peuple s’est
exprimé à 52% pour retirer le pays de la Communauté européenne, les
institutions traditionnelles ont été paralysées pendant trois ans. La solution : le scrutin majoritaire. Le gouvernement est élu par une minorité des
électeurs (41%) des votes mais, grâce aux distorsions causées par le mode de
scrutin, il obtient une forte majorité des sièges à la Chambre des Communes.
Avec 52% du vote, le peuple ne parvient pas à imposer sa décision. Avec 41%, le
parti au pouvoir y arrivera sans problème.
Parce que la compensatoire n’est pas un mode de
représentation proportionnelle. La proportionnelle cherche à reproduire une assemblée
élue à l’image de la volonté populaire exprimée lors d’une élection. Son but principal est que chaque électeur
soit effectivement représenté sauf ceux qui auraient donné leur vote à un parti
qui n’a pas atteint un seuil de participation (généralement de 2.5% à 5%).
Parce que le seul élément de proportionnalité dans la
compensatoire vise à mieux distribuer les sièges entre les partis alors que le peuple
continuera généralement à être gouverné par un parti contre lequel il a
majoritairement voté, et qu’il en sera de même pour la vaste majorité des
députés qui continueront à être élus en dépit du fait que la majorité de leurs
électeurs auront voté contre eux.
Parce que la compensatoire maintient le vieux mythe
voulant qu’un député puisse à lui tout seul représenter adéquatement tous les
électeurs de sa circonscription, comme si François Legault pouvait représenter à
leur satisfaction les électeurs libéraux de L’Assomption ou que le député de
Gouin reflétait bien les aspirations des électeurs non socialistes de son comté.
Parce qu’on n’a jamais entendu ni un citoyen ni un
député réclamer que le territoire et la population de sa circonscription soient
élargies, ce qui est le cas évidemment quand on ramène les 125 circonscriptions
uninominales à 80.
Parce qu’il ne saute pas aux yeux qu’on ait besoin de
deux classes de députés, 80 pris désormais à représenter plus de monde qu’avant
et 45 « députés de compensation » parce qu’on a volontairement conservé
un système de distorsions.
Parce que le projet de loi a raison de dire que « nos
régions administratives correspondent à une réalité sociologique et
géographique forte et qu’elles sont des lieux d’appartenance et de citoyenneté
profondément ancrés dans la culture politique du Québec », alors que la compensatoire n’utilise ces mêmes
régions que pour corriger les distorsions du mode de scrutin en faveur des
partis alors qu’un système authentiquement proportionnel ouvrirait la porte à
une véritable décentralisation des pouvoirs de Québec vers nos régions.
Parce qu’il n’est pas vrai qu’une réforme du mode de
scrutin introduise une « démocratie nouvelle ». Le meilleur mode de
scrutin au monde n’y suffirait pas. Une vraie démocratie va bien au-delà du
seul mode de scrutin, particulièrement dans le système britannique où le vrai
pouvoir ne se trouve pas dans l’Assemblée élue mais dans le bureau du Premier
ministre.
CONCLUSION : Vers une issue qui annonce le
pire
Alors que
le gouvernement actuel suit une démarche parfaitement démocratique en
soumettant la réforme du mode de scrutin à la décision ultime du peuple, il est
hautement regrettable que la proposition qui sera soumise au référendum émane
d’une entente entre partis politiques au lieu de surgir d’une volonté populaire
claire.
En 1983-84,
à la demande de l’Assemblée nationale, la Commission de la représentation du
Québec a mené une large consultation populaire sur tout le territoire
québécois. Soixante pourcent (60%) des intervenants se sont prononcés en faveur
d’un mode de scrutin par représentation proportionnelle; vingt pourcent (20%)
en faveur d’un mode mixte; dix pourcent (10%) en faveur de maintenir le scrutin
majoritaire. La Commission soumit son rapport à l’Assemblée nationale le 28
mars 1984. Sa recommandation : que le Québec se dote d’un mode de scrutin par
représentation proportionnelle territoriale.
En
2002-2003, les États généraux sur la réforme des institutions démocratiques firent
une consultation plus large encore. À la fin du processus de consultation, mille
délégués réunis en assemblée générale se sont prononcés à 90% en faveur de rejeter
le mode de scrutin actuel. Dans son rapport final, le Comité directeur des
États généraux, présidé par Claude Béland, constata qu’il avait rencontré un
certain intérêt pour un mode de scrutin mixte mais que cette formule ne
rencontrait pas les attentes exprimées dans l’ensemble de la consultation. Le
Comité directeur proposa formellement que le Québec se dote d’un mode de
scrutin par représentation proportionnelle régionale.
Après que
le projet de René Lévesque eut été torpillé par les membres de son propre
caucus, à Drummondville, le 15 août 1984, le député de Saint Jean, présent au
caucus, a écrit :
La plus grande déconvenue de René Lévesque au caucus lui
vint de l’avortement de son projet concernant la représentation
proportionnelle. Il croyait à l’absolue nécessité de ce mode de représentation
électorale. Ce fut là pour René Lévesque, démocrate, une déception
amère ». — Jérôme Proulx : René Lévêque, l’homme, la nation,
la démocratie. Presses de l’Université
du Québec, 1992, page 137
Le projet
de René Lévesque avait pourtant été adopté le 12 mars 1983 par le conseil des
ministres de son gouvernement. Les arguments sur lesquels reposait cette
décision étaient importants. Une véritable proportionnelle est impraticable en
tentant de préserver le scrutin majoritaire traditionnel. Une véritable
proportionnelle fait que le vote de chaque électeur compte pour le vrai. Une
véritable proportionnelle appliquée dans nos régions fournit les territoires dans
lesquels peut enfin s’appliquer une politique de décentralisation des pouvoirs
de Québec vers les régions.
La
compensatoire ne rencontre aucun de ses trois objectifs. Aussi est-il important
de féliciter le gouvernement pour ne pas avoir inclut le mot « proportionnel »
dans la question qui sera posée au référendum.
Malheureusement Il faut s’attendre à ce que les défenseurs de la
compensatoire n’hésiteront pas d’affirmer erronément que leur proposition
constitue « une proportionnelle ». Ce n’est pas le cas.
À mon sens,
consulter le peuple par référendum est ce qu’il y a de plus démocratique. Le
faire avec la proposition actuelle, c’est se préparer à un drame majeur. Dans
le cas où le NON l’emporte au référendum, les adversaires de la réforme diront
que la proportionnelle est enterrée à jamais.
Dans le cas où le OUI l’emporte, les partis politiques auront eu gain de
cause et le Québec s’enfermera pour longtemps dans un système pire que
maintenant.
Sur une
note plus personnelle
Ayant
défendu toute ma vie l’idée de réformer le mode de scrutin, je me fais souvent
demander pourquoi je ne soutiens pas le projet de réforme en cours. Je
m’explique, et souvent on me dit : oui, mais il s’agit quand même d’un pas
dans la bonne direction. Je ne suis absolument pas d’accord. La compensatoire
constitue un exercice partisan de « patchage » d’un système
« infect », pour reprendre le mot très juste de René Lévesque. Pour
toutes les raisons données plus haut, je pense qu’il constitue un recul même sur
le système actuel.
La compensatoire
cherche à faire justice aux partis politiques. Un mode de scrutin démocratique
cherche à faire justice aux citoyens. Le mal le plus profond qui mine la
démocratie québécoise et qui rend les citoyens souvent cyniques est
l’usurpation du pouvoir citoyen par les partis politiques. La véritable voie de
sortie vers le transfert du pouvoir partisan au pouvoir citoyen ne sera prise
chez nous que le jour où cette société décidera de donner au Québec sa propre
constitution. Si cette constitution émane d’une assemblée constituante
citoyenne, donc libérée des partis, elle assoira définitivement la souveraineté
du peuple à sa base et redéfinira, non seulement le mode de scrutin, mais
l’ensemble de nos institutions politiques. Là sera le vrai moment de tenir un vrai
référendum !
Saint Hyacinthe, le 24
janvier 2020
Communiqué, le 14 septembre 2022
une constitution pour le quÉbec
Le
MDCQ (Mouvement Démocratie et Citoyenneté québécoises) demande aux partis
politiques de s’engager à permettre au peuple québécois d’écrire sa propre
constitution.
Il
ne fait aucun doute que, au-delà des questions d’intendance qui accaparent
cette campagne électorale (systèmes de santé et d’éducation, coût de la vie,
pénurie de main-d’œuvre, électrification des transports, gestion des ressources naturelles, etc.),
c’est l’avenir de la nation québécoise qui doit être l’enjeu majeur de cette
élection.
Le
parti qui prendra le pouvoir devra s’assurer d’un rapport de force exceptionnel
s’il veut espérer briser le mur qu’opposent le multiculturalisme canadien et
l’intégration mondiale aux exigences du Québec sur la laïcité, le français,
l’immigration, le financement de la santé, la démocratie et la citoyenneté
québécoises, etc.
Certes,
un vote massif pour le parti gagnant est important comme expression de la
volonté collective, mais, compte-tenu des nombreuses distorsions que notre
système électoral, basé sur les partis, impose à la représentation, il ne
saurait suffire. Le parti élu, quel qu’il soit, devra s’assurer d’un rapport de force de la part du
peuple québécois lui-même. L’expérience ayant montré qu’un référendum populaire
avait plutôt l’effet de dresser les forces les unes contre les autres, et donc
de nous diviser plutôt que de produire un consensus, la démarche la plus rassembleuse et démocratique serait de demander à
l’ensemble des Québécois•e•s de définir eux-mêmes la souveraineté du Québec
qu’ils souhaitent et croient possible dans une première constitution du Québec.
L’écriture
du projet de constitution devrait alors être confiée à une Assemblée
constituante citoyenne non partisane, représentative du peuple québécois dans
sa totalité, entièrement libre de ses
décisions (mandat ouvert, i.e. non imposé par les partis politiques),
donc, idéalement, tirée au sort, comme en témoigne l’échec du processus
constituant au Chili, et c’est ce projet de constitution qui devrait être
soumis comme tel à un référendum.
La
règle fondatrice de la démocratie, confirmée chez nous par le Jugement de la
Cour suprême dans le Renvoi relatif à la sécession du Québec (1998), stipule
que le peuple est souverain et que le Gouvernement canadien ne peut ignorer une
volonté clairement exprimée par le peuple québécois.
En conséquence, nous, du Mouvement
Démocratie et Citoyenneté québécoises, demandons à tous les partis qui
aspirent au pouvoir dans cette élection de s’engager :
1) à convoquer, dans la première année de leur mandat, une
telle Assemblée constituante citoyenne, représentative, non partisane et
entièrement libre de ses décisions, mandatée pour rédiger un projet de
constitution québécoise, après consultation de la population de toutes les
régions du Québec ;
2) à soumettre ce projet tel quel pour approbation par
référendum populaire dès la fin des travaux de l’Assemblée constituante.
• 30 •
Que peut faire Legault face au mur d’Ottawa ?
Par André Larocque et Roméo Bouchard
Réponse
brève : miser sur le peuple québécois lui-même.
À lire également...
Le MDCQ vous incite à lire l'article de monsieur Stephan Fogaing, «fier Québécois d’origine camerounaise», paru sur La Presse+ :
Le rêve de René Lévesque abandonné
par le Parti québécois sera-t-il réalisé
par François Legault ?
Le
texte qui suit a été publié dans le numéro de mai 2022 de l’Action nationale.
Il est largement basé sur des citations directes de René Lévesque.
Son propos
est d’illustrer que le jour où ses compagnons d’armes au PQ lui ont tourné le
dos (comme il l’explique en détail dans le chapitre un de son livre Attendez
que je me rappelle...) le peuple du Québec a tourné le dos au
Parti Québécois. Se faisant, le PQ s’est privé de l’élément essentiel
indispensable à la démocratie : la confiance du peuple. Cette confiance
populaire exceptionnelle dans la personne de René Lévesque jointe à la grande
fierté de René Lévesque pour son peuple a trouvé ces dernières années un
nouveau porteur. François Legault jouit d’un très fort appui populaire acquis
dans des conditions difficiles et qui semble vouloir se manifester massivement
le 3 octobre prochain. Sa fierté immense pour son peuple se manifeste
vigoureusement. L’heure n’est-t-elle pas venue de se demander si le rêve de
René Lévesque d’ « Option Québec » ou d’un « Québec
souverain dans une nouvelle union canadienne » est en voie de reprendre
racine ? (AL).
MDCQ
Cap sur l'élection du
3 octobre 2022
Le MDCQ partage quelques textes qui aideront à ancrer la réflexion qui doit précéder l'élection générale cet automne. Les Québécois et Québécoises sont invitéEs à réfléchir en vue du renouvellement de ses représentantEs à l'Assemblée Nationale.
« Le Québec est l'un des rarissimes coins du monde où c'est la minorité
et non la majorité qui assimile les nouveaux arrivants » écrivait René
Lévesque en 1971. Lévesque voyait 4 éléments constitutifs à la nation.
La question de l'immigration au Québec doit demeurer un des enjeux majeurs de la prochaine élection.
Michel David nous le rappelait dans Le Devoir du 22 février 2022 en reprenant les propos de Frédéric Lacroix.
L'auteur Étienne-Alexandre Beauregard a fait paraître «Le schisme identitaire» aux Éditions du Boréal. Roméo Bouchard s'appuie sur cet ouvrage pour faire avancer la réflexion .
Les fondateurs du MDCQ ont rédigé des articles et des textes porteurs. Prenez le temps de les lire et les écouter puis prenez part à la réflexion.
Par André Larocque
À quoi sert une constitution ?
André Larocque s'est adressé en ces termes aux 42 membres de l'assemblée constituante citoyenne qui ont participé au projet «CONSTITUONS!», projet dirigé par Christian Lapointe avec l'aide de l'Institut du Nouveau Monde (INM).
Entrevue avec Roméo Bouchard
Un des fondateurs se prononce sur le lancement du MDCQ
Roméo Bouchard est invité pour parler du MDCQ avec l'animatrice Anne-Christine Charest à l'émission Info Kam Extra sur les ondes de TVCK, la station régionale du Bas-Saint-Laurent. Cliquez sur l'image pour visionner l'entrevue.
Digne d'intérêt
Voici une chronologie établie autour du thème d'une constitution pour le Québec
Les dates et événements cités dans cette chronologie démontrent qu'un projet de constitution est ancré depuis longtemps dans l'histoire du Québec. Au MDCQ, nous souhaitons que la constitution cesse d'être un projet et plutôt QUE LE QUÉBEC SE DOTE ENFIN D'UNE CONSTITUTION.
pour se situer dans le portrait mondial et historique
quelques Citations
Voici un florilège de citations pertinentes.
Les
États généraux du Canada français (1969)
« La
Constitution du Québec doit contenir une déclaration selon laquelle l’autorité
constituante appartient au peuple du Québec.
La
Constitution doit reconnaître la volonté du peuple comme étant le fondement de
l’autorité des pouvoirs publics.
La
Constitution doit instituer le droit d’initiative populaire… »
La
recommandation 3 du Comité directeur des États généraux sur la réforme des
institutions démocratiques (2003)
« Que soit adoptée par l’Assemblée nationale
une loi reconnaissant aux citoyennes et aux citoyens le droit à l’initiative
populaire. »
L’article
138 de la Constitution de la Suisse
« 100,000 citoyens et citoyennes ayant
le droit de vote peuvent dans un délai de 18 mois à compter de la publication
officielle de leur initiative, proposer la révision totale de la Constitution. Cette
proposition est soumise au vote du peuple. »
L’article
1-46, section 4 de la Constitution de l’Union européenne
« La Commission, sur l’initiative d’un
nombre significatif au moins égal à un million de citoyens de l’Union issus d’un
nombre significatif d’États membres, peut être invitée à soumettre une
proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens
considèrent qu’un acte juridique de l’Union est nécessaire aux fins de
l’application de la présente Constitution. Une loi européenne arrête les
dispositions relatives aux procédures et conditions spécifiques requises pour
la présentation d’une telle initiative citoyenne. »
Le
préambule de la Constitution américaine (1787)
« Nous, le peuple des États, ordonnons
et établissons la présente Constitution pour les États-Unis d’Amérique. »
L’article
1 de la Constitution de la France (1958)
« La France est une République
indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la
loi de tous les citoyens sans distinction d’origine ou de religion. »
L’article
1 de la Constitution de la Suède
« Tout
pouvoir public en Suède procède du peuple. »
L’article
33 de la Constitution de la Belgique
« Tous
les pouvoirs émanent de la Nation. »
La Constitution de la France de
1793
« Le but de la société est le bonheur
commun. »
La Déclaration d’indépendance des États-Unis d’Amérique
(1776)
« Nous
tenons pour évidentes par elles-mêmes les vérités suivantes: tous les hommes
sont créés égaux; ils sont doués par leur Créateur de certains droits; parmi
ces droits se trouvent la vie, la liberté et la recherche du bonheur. Les
gouvernements sont établis parmi les hommes pour garantir ces droits et leur
juste pouvoir émane du consentement des gouvernés. Toutes les fois qu'une forme
de gouvernement devient destructive de ce but, le peuple a le droit de le
changer ou de l'abolir et d'établir un nouveau gouvernement, en le fondant sur
les principes et en l'organisant en la forme qui lui paraîtront les plus
propres à lui donner la sûreté et le bonheur. »
Préambule de la nouvelle constitution de la Bolivie (2009)
« Nous, femmes et hommes, à travers l'assemblée
constituante et en vertu du pouvoir premier du peuple, refondons la Bolivie;
nous construisons un nouvel État basé sur le respect et l'égalité pour tous,
fondé sur la souveraineté, la dignité, la complémentarité, la solidarité,
l'harmonie et l'équité dans la distribution et redistribution du produit social
afin de bien vivre; avec le respect de la pluralité économique, sociale,
juridique, politique et culturelle des habitants de cette terre; en
convivialité collective pour l'accès à l'eau, au travail, à l'éducation, à la
santé et aux nécessités de la vie pour tous. »
Constitution de la République d’Italie,
article 5 (1948)
« La République, une et indivisible,
reconnaît et favorise les autonomies locales; elle met en œuvre la plus large
décentralisation administrative dans les services qui dépendent de l’État; elle
adapte les principes et les méthodes de sa législation aux exigences de
l’autonomie et de la décentralisation. »
Constitution de la Suisse
« L'attribution et l'accomplissement des tâches
étatiques se fondent sur le principe de subsidiarité. La Confédération n'assume que les tâches qui excèdent les
possibilités des cantons ou qui nécessitent une réglementation uniforme par la
Confédération. »
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Marc
Brière
« La
constitution est un supplément d’âme pour fonder une nation civique intégrant les
diverses ethnies qui la compose ».
Guy
Rocher
« …il
faudra doter le Québec d’une constitution… La nation québécoise jouira ainsi
d’une personnalité juridique et politique à laquelle pourra se référer tout
citoyen… »
Marc
Chevrier
« Tout
peuple faiblit s’il ne persévère pas dans une constitution qui le met au
pouvoir, le munit d’un État et lui attache des protections pour ses
libertés… La constitution engage la
dignité démocratique des citoyens et sollicite leur capacité de se projeter
dans l’avenir. »
Jean
Yves Durocher
« Nous
n’avons jamais énoncé clairement, sans ambiguïté, ce que nous voulons être, ni
le pourquoi, ni le comment, ni la raison. »
La
Fédération des Femmes du Québec
« Que
l’on soit ou non souverainiste, il est important de définir de quoi on
parle. »